Jane Goodall répond au PDG d’Air France “faite preuve d’humanité”


14 juillet 2014

Nous traduisons ici la lettre de Madame Jane Goodall, célèbre primatologue opposée aux expérimentations sur primates. Elle répond aux propos de Monsieur Alexandre de Juniac, PDG d’Air France, justifiant les transports d’animaux en direction des laboratoires de recherches, par la nécessité de servir l’humain. Des propos trompeurs que Jane Goodall remet en perspective. (cliquez pour lire la version originale)

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Vous nous signalez  (dans votre précédent courrier – ndlr) que des millions de personnes souffrent du HIV / Sida et autres maladies, et que de ce fait, les primates se doivent d’être sacrifiés pour le bien de l’humanité. Malheureusement les expérimentations nécessitant l’utilisation de singes sont d’un bénéfice hasardeux.

Etudes après études, il a été démontré que les primates ne sont pas de bons modèles pour les maladies humaines. Un rapport capital, publié en 2011 par l’Academie Nationale des Sciences, a conclu que  la plus grande partie de la recherche biomédicale actuelle sur chimpanzés n’est pas nécessaire. Un rapport de 2013 publié par l’Institut National Américain de la Santé, a conclu que la recherche incluant des chimpanzés a rarement accéléré les nouvelles découvertes ou l’avancement de la santé humaine en ce qui concerne les maladies infectieuses .Si il ne nous est pas possible de découvrir  des traitements à travers l’expérimentation sur nos cousins les plus proches, alors il ne sera pas possible d’en trouver sur nos parents plus éloignés.

Comme je l’ai écrit, les singes, comme les grands primates, sont des animaux intelligents avec des personnalités distinctes, exprimant des émotions similaires à celles que nous nommons : dépression, chagrin, colère, inquiétude, peur et ainsi de suite. Ils ressentent très certainement la souffrance. En plus de cela, ils sont très sociaux, vivant en groupes très liés dans lesquels chacun connaît sa place.

Tout cela signifie que leurs conditions de vie en laboratoires sont hautement stressantes,  et il est reconnu que le stress peut compromettre le système immunitaire, rendant ainsi les expérimentations sur des individus stressés encore plus inutiles. 

Je me demande si vous-même avez déjà visité un tel laboratoire ?

Des recherches ont démontré que 90% des primates en laboratoires font preuve d’un comportement anormal causé par des abus physiques  et le stress psychologique résultant d’une telle isolation sociale (la plupart des animaux expérimentés sont encagés individuellement) et de l’environnement morose et stérile des laboratoires. 

Les symptômes incluent s’asseoir et se balancer sans cesse d’avant en arrière, tourner en rond et  réaliser des actions de manière répétitive comme sauter d’avant en arrière, en boucle.

Ils peuvent s’automutiler, comme par exemple s’arracher les poils, ou frapper leurs membres ou leur queue, se causant de graves blessures.

Bien entendu, les scientifiques continueront à utiliser des primates tant qu’ils recevront les fonds suffisants. Cela est  rassurant et a encouragé l’ouverture de nombreuses animaleries dans le monde occidental.

Cela signifie pourtant qu’il n’y a absolument aucun besoin d’importer des singes de leur pays d’origine pour la recherche. De plus il y a un grand danger qu’ils puissent transporter des agents pathogènes dans nos contrées. L’apparition de plus en plus de maladies, passant de l’animal à l’humain, étant d’ailleurs un problème à l’importance grandissante.

A la suite de ces éléments, il me semble que nous dégradons notre humanité pour peu ou pas de bénéfices contre la souffrance humaine, en assujettissant nos proches parents, les primates, aux tourments de la recherche biomédicale.

Il serait merveilleux, Mr de Juniac, si vous pouviez faire la preuve de votre propre humanité en rejoignant les autres compagnies aériennes et en bannissant le transport de singes dans les soutes effrayantes des avions d’Air France.

Pro Anima a, à de nombreuses reprises, alerté la Direction d’Air France de la non fiabilité des recherches sur le modèle animal qui n’en est pas un. Nos dossiers sont toujours restés sans réponse. Curieusement, la Direction d’Air France affirmait déjà en 2012, dans une note interne, ne pas avoir à juger du bien fondé de la recherche sur primates tout en déclarant que celle-ci, (la recherche sur animaux ), restait indispensable pour vaincre les maladies humaines !

Nous soutenons pleinement la démarche de Jane Goodall.