TP expérimentation animale : une étudiante témoigne


17 avril 2018
TP expérimentation animale : une étudiante témoigne

Le témoignage de Lisa1

En 2015, J’ai demandé à être transférée à l’IUT Lyon 1 pour me rapprocher de ma famille. Avant d’entrer dans ce cursus je me suis informée.

Je savais que le programme comportait une option “expérimentation animale” qui utiliserait des animaux de laboratoire. J’ai fait en sorte d’avoir confirmation auprès de l’IUT qu’il s’agissait bien d’une option.

Prenant le terme “option” pour ce qu’il veut dire, j’ai quand même accepté d’entrer à l’IUT en pensant n’être obligé à rien vis à vis de l’expérimentation…

Pourtant, tous les travaux pratiques de pharmacologie sont en réalité des TP d’expérimentation animale.

10 animaux par TP, par classe, par semaine.

Un TP de quatre heures par semaine, environ dix binômes par TP, un animal par binôme. Cela fait dix animaux par TP, par classe, par semaine. Les animaux arrivent vivants dans des cages et sortent morts dans des sacs poubelles. La plupart du temps, nous devions les piquer au pento-barbiturique pour les plonger dans le coma, les opérer, puis les piquer une nouvelle fois pour les tuer. Pendant tout le TP ils sont contentionnés sur le dos avec les pattes scotchées.

Lors d’un des TP nous devions enfermer un rat dans une boite de contention à peine assez grosse pour lui, afin de lui bloquer la queue et prendre sa tension artérielle. Pour un autre, nous avons dû opérer un rat pour mettre des fils sur son estomac, puis le refermer, le maintenir en vie une semaine, brancher les fils à une machine, prendre des mesures, puis tuer le rat. Pour un autre, nous avons dû extraire le cœur d’un cochon d’inde de sa poitrine et le plonger, encore battant, dans un liquide de survie afin de tester différentes substances chimiques sur lui. On laissait le cobaye se vider de son sang dans sa propre cage thoracique. Pour un autre, ils nous ont fait décapiter une grenouille vivante, au ciseau, sans aucune anesthésie. 

J’ai rapidement commencé à avoir des palpitations en entrant dans la salle de TP. J’ai dû me faire prescrire des anxiolytiques par mon médecin.

J’ai dû me faire prescrire des anxiolytiques par mon médecin.

Quand les élèves pleuraient ou tremblaient, la professeure venait leur prendre les mains pour les forcer à opérer. Quand des élèves ont commencé à ne plus venir, l’IUT a mis en place des TP de rattrapages obligatoires les samedis matin. Toujours en menaçant de ne pas accorder le diplôme à ceux qui s’absentaient trop souvent.

Tant qu’ils arrivent à justifier que l’anesthésie compromettrait les résultats de l’expérience ils ont le droit de s’en passer. Selon eux, les animaux sont bichonnés dans l’animalerie, incapables de survivre dans le monde extérieur, et destinés à mourir. Comme ils sont dans le coma lorsqu’on les opère, “rien de douloureux ne leur est infligé”.

Cela ne les empêche pas de crier quand on les pique, et d’avoir des spasmes quand on pose le scalpel sur leur peau.

Tout ça pour quoi ? Infliger à des élèves qui ne sont pas intéressés de tuer des animaux juste pour apprendre à le faire ?

J’ai eu une très mauvaise moyenne en pharmacologie mais j’ai finalement obtenu mon diplôme avec la mention AB. Depuis je travaille et n’ai jamais eu de difficultés à trouver un emploi sans jamais avoir eu besoin du certificat d’expérimentation animale.

J’espère qu’ensemble nous parviendrons à informer le plus de gens possible, afin que mon témoignage serve à quelque chose.

Lisa


Le point sur la réglementation : en contradiction avec la réglementation

En France le nombre d’animaux utilisés dans l’enseignement est en hausse. De 25 908 bêtes utilisées en 2014, le chiffre atteint 34 280 victimes pour 2016.

Notre pays bafoue l’esprit de la Directive 2010/63/UE relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques.

Celle-ci, dans le principe des “3 R” (Réduction, Remplacement, Raffinement) demande une réduction du nombre d’animaux utilisés en science quand cela est possible.

De plus, le point 10 du préambule de la Directive stipule que chaque animal a une valeur intrinsèque qui doit être respectée.

Dans le cadre de l’enseignement supérieur, selon l’article R214-105 du code rural et de la pêche maritime seules sont licites les procédures expérimentales (qui) ont un caractère de stricte nécessité et ne peuvent pas être remplacées par d’autres méthodes expérimentales n’impliquant pas l’utilisation d’animaux vivants et susceptibles d’apporter le même niveau d’information.

Les établissements sont tenus de respecter les principes de remplacements, de réduction et de raffinements.

Des êtres vivants jetables : un message dangereux pour les jeunes

Ces pratiques posent de nombreux problèmes d’ordre éthique.

Banaliser ce type de pratiques favorise l’indifférence au vivant et constitue également un apprentissage de la violence.

En sous estimant la valeur d’un être sensible tué dans le simple but d’effectuer une procédure inutile, un jeune n’est pas encouragé à respecter le vivant et à en être solidaire. Un complexe de type excitation/fascination accompagné d’autres instincts agressifs, peut être généré.

La maltraitance animale doit être prise au sérieux.

Selon la revue la Dépêche vétérinaire (N°1112 du 19 février 2011) des études ont commencé à voir le jour, dès les années 80, faisant le lien entre la cruauté envers les animaux et la psychopathologie qui a depuis fait son entrée dans les manuels de psychiatrie.

Aujourd’hui, le FBI reconnaît le lien entre violence sur animaux et violence sur humains en intégrant cette notion dans ses procédures d’identification de criminels.

Le corps enseignant a tout intérêt à encourager la solidarité et le respect envers le vivant.

Innovation technologique et design thinking pour penser la recherche autrement. Ce qu’on devrait faire

 

L’incroyable table de dissection virtuelle, ou encore le mannequin P.V.C ultra réaliste d’un patient (humain ou animal), capable de bouger, de respirer et de saigner, montrent que nous sommes loin de simples maquettes en plastique d’antan. Les technologies de remplacement sont disponibles et nous pensons que les jeunes de la génération 2.0, adoreraient apprendre de cette manière. L’utilisation de ces méthodes, couplée avec des stages d’observation en cliniques vétérinaires et des TP sur cadavres éthiquement récupérés afin d’être confronté au réel, pourrait fournir un enseignement de qualité, réellement supérieur.

Par ailleurs, afin de créer une nouvelle culture de recherche et de casser la routine du “tout animal” dans les facultés, des ateliers de design thinking, permettraient aux étudiants de penser autrement, dans une émulation intellectuelle, de nouvelles manières de faire de la recherche.

Enfin, le développement de cours d’éthique dans les universités, peut-être en amont de l’étude du vivant, permettrait de réfléchir en commun avec les étudiants sur la légitimé et l’utilité scientifique de l’utilisation d’animaux dans le cadre de leur enseignement.

Il est plus que jamais nécessaire de faire passer le message qu’il existe d’autres façons d’enseigner le vivant, plus respectueuses et efficaces.

Pro Anima soutient la recherche hors expérimentation animale

Pro Anima promeut une recherche éthique, hors expérimentation animale. Déjà plus de 50 000 € remis à des programmes de recherche biomédicale n’impliquant aucune expérimentation animale dans le cadre du cancer, de parkinson et de la toxicité.

En partenariat avec les organismes de protection animale les plus importants, Pro Anima pilote Valitox, un programme de toxicologie ne faisant pas appel aux essais habituels sur animaux.

1 le nom a été modifié.

  1. le nom a été changé pour préserver l’anonymat de la personne, sur sa demande