Témoignage  : utilisation de cobayes à l’Université.

Témoignage : utilisation de cobayes à l’Université.


4 mai 2016

Est-ce une façon de nous désensibiliser ? s’interroge une étudiante.

Un nouveau témoignage nous provient d’une étudiante concernée par le sort des animaux utilisés à des fins de recherche. Merci à cette jeune personne dont nous respectons l’anonymat. Son texte est tout à fait intéressant et démontre, si besoin était, que l’utilisation des animaux même dans l’enseignement universitaire est loin de faire consensus…

Je suis étudiante à l’UPMC au sein d’une filière paramédicale depuis quelques années. Il n’est pas rare, dans le cadre des enseignements qui me sont dispensés, d’entendre les professeurs passer du temps à détailler des travaux de chercheurs qui, selon eux, ont fait avancer l’état de l’art de la médecine.

Soyons clairs, je suis passionnée par mes études et suis très heureuse du haut niveau de mes cours. Je ne suis pas non plus peu fière d’avoir intégré mon université. Cependant, alors que nous passons du temps à étudier la façon dont ont été conduites certaines expériences, je m’étonne toujours du peu de cas qui est fait des sujets qui ont sacrifié leur corps et leur vie dans le processus, à savoir les animaux de laboratoire : rats, chiens, singes, etc.

Evidemment, lorsqu’on nous parle d’expériences conduites aux siècles passés jusqu’aux années 1960, je ne m’étonne guère des méthodes empiriques des chercheurs et je me dis que c’était l’époque qui voulait cela. Ainsi, les amis des chats seraient étonnés du nombre d’expériences qui ont conduit à mutiler des félins.

Toutefois, comment ne pas douter des méthodes de scientifiques qui vous expliquent avec enthousiasme des pratiques récentes qui relèvent de la torture ? Je me souviens par exemple d’un cours où l’intervenant nous parlait avec beaucoup de fierté d’une expérience qu’il avait mené avec son équipe en 1999 : il montrait que certaines fibres nerveuses interrompues étaient capables de repousser. Lorsque j’ai demandé avec ingénuité si les photos en gros plan de nerfs saucissonnés et reconstitués étaient celles de patients, il m’a répondu sur un ton qui m’a semblé terriblement indifférent Non, il s’agit de rats.

J’ai rencontré d’autres situations similaires. On nous a ainsi présenté une expérience menée en 1984 par un certain Merzenich. Ce dernier avait trouvé intéressant d’amputer des singes de certains de leurs doigts, afin de prouver que leur cerveau pouvait se réorganiser. Je suis en situation d’apprentissage, je veux donc bien envisager l’intérêt d’une telle expérience. Mais pourquoi aucun commentaire n’a‑t-il été fait lors de mon cours sur l’éthique de ce genre de protocole ?

Je commence à penser que cette façon de présenter les cobayes aux étudiants comme du simple matériel de laboratoire est une façon de nous désensibiliser et de nous faire accepter sans réserve l’expérimentation animale. Pourtant, l’esprit critique n’est-il pas le meilleur moteur de la science ? Ne faut-il pas, au XXIe siècle, s’interroger sur l’intérêt de modèles élaborés sur des sujets non humains ou sur la fiabilité thérapeutique de molécules testées sur des organismes différents du nôtre ?

Il me vient une histoire drôle pour terminer ce témoignage. Vous connaissez l’histoire du fou qui cherchait ses clefs sous un réverbère ? À un passant interloqué par son comportement, il expliqua : Ah, mes clefs sont sous le réverbère d’en face, mais que voulez-vous, je cherche sous celui qui a de la lumière !