ELECTIONS 2012


21 février 2012

Cette année, nous sollicitons les candidats aux élections présidentielles 2012, sur le thème des expérimentations scientifiques sans utilisation animale. Nos questions sont relayées par une interpellation de Mlle Pollet, étudiante en classe préparatoire véterinaire et scientifique militante pour Pro Anima.

NOS QUESTIONS :

1/ Serriez vous d’accord pour encourager la validation du programme VALITOX/Evatox à l’ECVAM et plus généralement soutenir les validations des méthodes dites alternatives ou substitutives, en particulier, dans le domaine toxicologique, dans le cadre de REACH (Enregistrement, Evaluation, Autorisation des produits chimiques)
2/ Quelles sont les mesures pour soutenir les méthodes fiables d’évaluation de la toxicité hors modèle animal sur le plan non seulement scientifique mais aussi législatif en vue de faire évoluer nos lois en faveur d’une recherche moderne et éthique ?

3/ Quelle incitation, de quelle nature, l’État pourra-t-il apporter à une entreprise s’engageant dans cette orientation ? Aux laboratoires développant des méthodes dites alternatives ou substitutives ?

4/ Quelles lois incitatives entendez-vous mettre en place en faveur des méthodes dites alternatives ou substitutives ?

5/ Allez-vous encourager la proposition de Loi à l’objection de conscience pour l’expérimentation animale, sachant que l’Italie et la Belgique ont déjà adopté une telle loi ?

6/ Quels sont les résultats du Groupement d’intérêt Scientifique sur les méthodes alternatives à l’expérimentation animale créé en novembre 2007 ?

7/ L’État compte-t-il publier de nouvelles statistiques concernant l’expérimentation animale dans les laboratoires d’état et exiger des bilans pour les laboratoires privés ?

Professeur Jean-François Béquain
Président du Comité Scientifique Pro Anima
Professeur Honoraire (Université de Bordeaux 2)
Habilité à diriger des recherches
Docteur d’Etat et Docteur Es Science.

NOTRE INTERPELLATION

Expérimentation animale : un changement de cap nécessaire.…

Mesdames et Messieurs les candidats à la Présidentielle de 2012,

A ce jour, les méthodes d’évaluation scientifique de traitements thérapeutiques destinés à l’être humain n’ont pas été remises en cause et n’ont fait l’objet d’aucun débat électoral.

Malgré l’essor fulgurant de techniques de laboratoire modernes et éthiques (toxicogénomique, tests sur cultures cellulaires humaines, modélisations informatiques, bases de données centralisées pour éviter la répétition d’expériences, règle des 3R…) [1], le principal matériel d’étude reste encore de nos jours le modèle animal. 
Pour l’année 2008, on estimait que 12 millions de vertébrés (dont 80% de rongeurs et de lapins) ont fait l’objet d’expériences dans les laboratoires, et cela en comptant uniquement l’Union Européenne (!). On leur fait subir moult tests cosmétiques, essais pharmaceutiques, ingestion de toxiques, modifications génétiques, hybridations et xénogreffes, afin de chercher des traitements, d’élaborer des médicaments, de tester des produits de beauté, d’évaluer l’impact des pesticides, de l’alcool, du tabac, des armes également, pour notre soi-disant santé, ou de créer des « monstres » OGM (Organismes Génétiquement Modifiés).

Mais force est de constater que les résultats ne sont pas toujours au rendez-vous : en effet, les résultats valables pour une espèce animale ne sont pas transposables automatiquement à une autre. Cela tient à l’existence de mécanismes physiologiques et moléculaires différents, basés sur la possession d’un matériel génétique variable. Citons quelques faits parmi une infinité : la pénicilline, un antibiotique très utilisé pour l’homme, qui tue les cochons d’Inde, est sans effet sur les lapins ; l’aspirine tue les chats et provoque des déformations fœtales chez les rats, les souris, les chiens et les singes ; la morphine qui est un tranquillisant pour l’homme est un excitant pour les chèvres, les chats et les chevaux… De plus, les résultats peuvent considérablement varier en fonction du sexe des animaux, de leur alimentation, de leur niveau de stress ou même de la qualité de la litière qui leur est fournie… C’est d’ailleurs une variation individuelle qui est aussi retrouvée chez l’humain [2].

On peut donc légitimement douter de l’intérêt réel de ce type de recherche ! Sans compter que leur inutilité peut causer bien du tort lors de l’extrapolation à l’homme : en effet, on ne compte plus le nombre de victimes décédées à la suite d’essais cliniques de médicaments qui s’étaient révélés totalement inoffensifs chez l’animal, ou de remèdes mis sur le marché et précipitamment retirés, suite à de nombreux décès de patients (citons les cas tristement célèbres de la Thalidomide, du Distilbène, du Médiator récemment) [3].

Au vu des faits exposés, je vous invite, Mesdames et Messieurs les candidats à la Présidentielle de 2012, à soutenir l’action du Comité Scientifique Pro Anima, qui demande l’arrêt progressif des tests sur les animaux au sein de l’Union européenne, un véritable encouragement des méthodes alternatives à l’expérimentation animale et leur validation, couplés à une révision intelligente de la directive européenne du 22 Septembre 2010 prévue en 2017 (ancienne Directive CEE 86 – 609) concernant le sort des animaux de laboratoire. Seule une décision forte au niveau Européen, si ce n’est Mondial, pourra changer l’avenir des millions d’animaux massacrés chaque année dans nos pays réputés civilisés, et par la même manière permettra de construire une science responsable et fiable pour le bien de l’humanité. En effet, les causes animale et humaine étant intimement liées, la moindre des choses est de reconnaître le respect qui revient de droit à toute forme vivante partageant notre planète.
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » Rabelais

[1] : beaucoup de données à ce sujet, principalement anglophones : http://www.frame.org.uk/ , http://altweb.jhsph.edu/resources/searchalt/searchaltdata.html
Et quelques exemples en pratique de recours à des modèles de recherche non animaux : http://www.ineris.fr/centredoc/dp-methodes-alternatives.pdf
[2] il s’agit de la pharmacogénomique, étude des variations individuelles à la prise d’un médicament, cf rapport du Sénat http://www.senat.fr/rap/o99-020/o99-0207.html
[3] liste non exhaustive avec d’autres exemples (en anglais) http://www.dlrm.org/resources/alternative.htm

Salomé Pollet,
Etudiante en classe préparatoire vétérinaire .